Resident Evil (Paul W.S Anderson, 2002)

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Réalisateur : Paul W.S Anderson
Origine : UK, Allemagne, États-Unis
Année de production : 2002
Durée : 1h41
Interdiction : Interdit aux moins de 12 ans
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Interprètes : Milla Jovovich, Eric Mabius, Michelle Rodriguez

Dans un immense laboratoire souterrain, ont lieu des recherches ultras secrètes, supervisées par des centaines de scientifiques. Lorsque l’alarme retentit, tout le monde croit à une simple simulation d’évacuation. Mais bientôt, l’horreur les rattrape. Un virus hautement mortel se propage à un rythme effréné dans les couloirs : en quelques minutes, il met fin à toute vie humaine. Au même moment, Alice se réveille dans un somptueux manoir. Ignorant comment elle a pu atterrir là, elle fait la rencontre de Matt, un policier. Avant même qu’ils n’aient pu trouver une explication logique à ces phénomènes étranges, un groupe d’intervention militaire, les S.T.A.R.S, débarque de nulle part et les oblige à les suivre. Ces derniers ont reçu l’ordre d’infiltrer le laboratoire et de neutraliser la Red Queen, le super-ordinateur devenu fou que l’on tient pour responsable du désastre.

Première adaptation cinématographique du jeu vidéo éponyme qui allait donner suite à une longue série de blockbusters tous plus mauvais les uns que les autres, Resident Evil devait au départ être écrit et réalisé par le Master Of The Dead en personne, j’ai nommé George A. Romero. Cependant, celui-ci se rétracta en 1999 pour divergences artistiques (tu m’étonnes !) et le projet échoua finalement à Paul W.S Anderson, qui avait déjà plus ou moins fait ses preuves – plutôt moins que plus – avec son adaptation niaise à souhait du célèbre et ultra-gore jeu de baston Mortal Kombat en 1995. Il y a fort à parier que Resident Evil aurait été bien meilleur sous la direction de Romero, d’autant plus qu’Anderson, désireux de toucher un large public de jeunes ados pré-pubères de 12 ans max tout en évitant le risque de la censure, ne fit rien d’autre que saccager l’ambiance glauque et oppressante si caractéristique du jeu qui connut ses heures de gloire sur Playstation dans les années 90 en nous en livrant sa version ultra-épurée. En dépit de sa promo mensongère au possible et de la prétention à en crever les yeux qui émane de quasiment chacun de ses plans, Resident Evil fait office de pétard mouillé davantage mû par une stratégie commerciale peu subtile que par un réel désir de faire plaisir aux fans du jeu vidéo en lui rendant hommage.

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En réalité, la seule réussite du film reste sa bande-son électrique composée par l’Antichrist Superstar Marilyn Manson en collaboration avec l’italien Marco Beltrami. Alliant mélodies électroniques à la fois enfantines et angoissantes et riffs endiablés de guitare sonnant très heavy metal, la musique de Resident Evil lui confère ce petit semblant d’identité dont il manque cruellement. Que ce soit pour instaurer une atmosphère apocalyptique, comme dans la toute dernière scène du film (la seule qui en jette vraiment) durant laquelle Alice (Milla Jovovich, Le 5ème Élément ; Phénomènes Paranormaux) sort de l’hôpital désert et se retrouve seule contre tous dans une ville dévastée ; ou encore pour souligner la dimension juvénile d’Alice et de la Reine Rouge, les tonalités métalliques des thèmes aux airs de berceuses maléfiques du Pope Of Dope constituent l’un des seuls éléments du métrage qui ne soient pas bons à jeter. Dommage que le travail efficace et original de Manson se trouve allègrement massacré par la présence insipide de quelques noms de la scène metal et nu metal tels que Slipknot, Rammstein et Adema, qui quant à eux viennent pleinement confirmer la visée principalement commerciale de Resident Evil consistant à accumuler des personnalités connues pour faire vendre toujours plus autour du film.

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Mais qu’en est-il du principal intérêt du film, les zombies ? Eh bien, ils sont plutôt pas mal à vrai dire : lents, dégoulinants de sang, traînant la patte et crevant la dalle, ils constituent une menace massive et omniprésente, même si leurs apparitions sont très souvent bourrées de clichés et davantage vectrices de scène d’action tout sauf originales que d’horreur pure et dure. Le mutant du film, l’arme secrète de la Reine Rouge, est quant à lui atrocement décevant car modélisé en CGI minables et déjà largement dépassés en 2002. Les nombreuses scènes d’action sont certes plutôt punchy mais, là où Romero aurait très certainement choisi de montrer du gore, le courageux Anderson préfère couper pour rendre la chose plus facilement digérable… Sans parler de l’insupportable bande-son de metal agressif qui accompagne systématiquement ces scènes plates à en crever, convoquée uniquement dans l’espoir de faire imaginer au spectateur ce que le film ne montre pas en tâchant vainement de les rendre plus violentes. Quelques passages seulement osent montrer un peu de barbaque et encore, un seul en fait : celui du couloir piégé qui par ailleurs semble allègrement pompé sur la scène d’introduction du génialissime Cube de Vicenzo Natali.

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Resident Evil prend le parti d’adopter un aspect très « science-fiction » qui l’en éloigne considérablement de l’ambiance crade et glauque du manoir du premier  jeu vidéo de la saga : hologrammes, caméras et gadgets dernier cri, gros flingues ultra-sophistiqués et I.A surdéveloppée, l’univers du film est formellement assez bien abouti même s’il ne fait pas vraiment preuve d’une grande originalité. Tantôt crades et obscurs, comme la gare du Hive, tantôt lumineux et froids, épurés au maximum avec prédominance du métal, comme les salles de recherches scientifiques et l’hôpital dans lequel se réveille Alice à la fin du film ; les décors visent à instaurer une tension latente qui nous pousserait à penser que tout peut arriver au sein de ces lieux hostiles et impersonnels, marqués par la démesure et l’ambition du progrès avec un grand P. Malheureusement, cette potentielle tension se trouve tuée dans l’œuf par la superficialité du scénario et des personnages…

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En effet, les protagonistes principaux sont malheureusement très creux et horriblement lisses : entre le flic Matt (Eric Mabius, Sexe Intentions ; Reeker) complètement insipide et parfaitement inutile, dont la présence s’explique uniquement par le fait qu’il serve à préparer le terrain pour l’arrivée du Némésis dans Resident Evil : Apocalypse ; la femme-soldat Rain (Michelle Rodriguez, Fast And Furious ; Machete) insupportable car stéréotypée à fond et le pseudo-méchant et pseudo-beau gosse Spencer (James Purefoy, Solomon Kane) plus inexpressif encore qu’une moule morte ; il semble évident que Paul W.S Anderson ne soit pas vraiment doué pour susciter l’empathie du spectateur envers ses personnages. Seule Milla Jovovich parvient à ressortir à l’écran, mais je soupçonne sa petite robe rouge d’y être pour quelque chose…

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En définitive, Resident Evil fait figure d’adaptation complètement ratée du jeu vidéo mythique, qui déçoit de par son côté édulcoré à fond et ses effets spéciaux ridicules. Illégitimement prétentieux (comme tous les autres volets de cette saga minable que réalisera Paul W.S Anderson) et malhonnête au possible car n’honorant pas du tout son « contrat » de produire un film gore et effrayant digne du jeu vidéo (ce que sa promo n’avait aucun scrupule à suggérer), Resident Evil reste un film de pseudo-horreur destiné aux ados, qui ne respecte pas même les attentes des fans du jeu, qui par ailleurs risquent d’être fort déçus. Pour les autres, eh bien, je vous conseille de vous jeter sans plus attendre sur le scénario original de George A. Romero, disponible en magasin et sur le Net, plutôt que de perdre votre précieux temps avec cette bouse…

Hell Of The Living Dead (Vincent Dawn, 1980)

Titre original : Virus Cannibale
Réalisateur :   Vincent Dawn alias Bruno Mattei
Origine : Italie, Espagne
Année de production : 1980
Durée : 1h41
Distributeur : NC
Interdiction : Interdit aux moins de 16 ans
Interprètes : Margit Evelyn Newton, Frank Garfield, Selan Karay

Nouvelle-Guinée. Un accident à l’intérieur de ce qui ressemble à une centrale nucléaire transforme les employés et les habitants de la région en monstres cannibales. Contaminés par un virus fabriqué e laboratoire dans le but de régler le problème de la surpopulation de la planète les morts-vivants se jettent sur les soldats du commando d’élite envoyé par le gouvernement. Rapidement, la situation devient incontrôlable et l’horrible contagion se répand dangereusement…

Après visionnage, une question se pose d’emblée : Hell Of The Living Dead serait-il le nanar ultime que l’on attendait tous ? Bien que Virus Cannibale (en français) constitue en soi une aberration totale, force est d’admettre qu’il s’agit là du long-métrage le plus réussi – ou plutôt le moins pourri– de feu Bruno Mattei (Zombi 3 ; Horror Cannibal ; L’Ile des Morts-Vivants), bien connu des cinéphiles nanarphages pour son statut de maître incontesté de la série Z et son goût immodéré du plagiat sans scrupules. En effet, et pour une fois, celui qui se cache sous le pseudonyme de Vincent Dawn (eut-être par peur des représailles ?) a pu bénéficier pour on ne sait quelle raison d’un budget plus ou moins correct pour mener à bien son projet qui dès les premières minutes semble fort s’inspirer d’un certain Dawn Of The Dead de 1978 (nous y reviendrons un peu plus tard)… Toujours épaulé par son fidèle collègue scénariste-producteur opportuniste Claudio Fragasso (Zombie 4), Mattei nous livre ce qui restera dans l’histoire du cinéma comme le nanar le plus ambitieux de tous les temps…

En effet, ce qui frappe dès le générique d’introduction, c’est la présence inespérée au casting du groupe Goblin, à qui l’on doit les excellents scores de chefs-d’œuvre du cinéma d’horreur tels que Les Frissons de l’Angoisse ou Suspiria de Dario Argento, entre autres. Comment expliquer cet évènement surréaliste ? Eh bien, c’est simple : ce cher Mattei s’est tout bonnement cru en droit de pouvoir dérober plusieurs des morceaux composés pour la version Argentesque du film Dawn Of Dead et le moins connu Contamination de Luigi Cozzi. Gonflé, le Bruno… Mais les similitudes avec le film culte de George A. Romero ne s’arrête pas là, notre réalisateur italien préféré ayant poussé le vice jusqu’à carrément copier certains éléments de l’intrigue de Dawn Of The Dead. Après une scène d’introduction parfaitement risible ou des ersatz de scientifiques affolés se contentent de balancer des termes techniques à-tout-va (« Évacuez le module Antarès » ; « Point de convergence OK ») en appuyant toutes les trois secondes sur des boutons clignotants, nous retrouvons un commando de soldats d’élite entièrement vêtus de bleu chargés de pénétrer un immeuble où a lieu une prise d’otages. Cela ne vous rappelle rien ? Attendez donc d’apprendre la suite… Mattei, pas malin, a même eu l’idée géniale (et ô combien originale) d’accompagner cette scène du même morceau musical que celle de Dawn ! La ressemblance est alors frappante, et ce qui était de l’ordre de l’étrange sentiment de déjà-vu se transforme tout à coup en certitude indignée : cette scène est bel et bien plagiée.

Ainsi Hell Of The Living Dead s’efforce t-il vainement d’implanter son scénario dans un univers similaire, voire parallèle, à celui du deuxième volet de la saga Romerienne… Entreprise tout ce qu’il y a de plus raté. En effet, l’histoire du film atteint des sommets de banalité en matière d’invasion zombiesque, jugez-en par vous-mêmes : l’Occident, toujours à l’affût de quelque trouvaille technologique pour imposer sa supériorité écrasante au reste de la planète, met au point une arme bactériologique censée éliminer le Tiers-Monde de manière définitive. Naturellement, la centrale chargée de fabriquer cette arme redoutable, basée en Nouvelle-Guinée, connait un accident tragique. Tous les scientifiques sont éliminés et le virus mortel se répand à l’extérieur, entraînant alors un génocide aux conséquences bien plus lourdes que ce que ses instigateurs auraient pu imaginer. Dans ce foutoir, des militaires en mission secrète en Nouvelle-Guinée vont croiser la route de deux journalistes venus enquêter sur les faits. Ils vont alors tenter de survivre à une population transformée en morts-vivants affamés de chair humaine… Rien de bien original, en somme, traité qui plus est avec de très, très grosses ficelles et une cruelle absence de dynamisme. Non, vraiment, Bruno Mattei n’est pas ce que l’on peut appeler un cinéaste doué.

Mais ce qui est bien avec Hell Of The Living Dead, c’est qu’il peut aussi faire office de documentaire animalier, pour ceux qui rêvent de terres sauvages à leurs heures perdues. Je m’explique… Le film contient autant de scènes effectivement tournées que de stock-shots tout ce qu’il y a de plus inutiles et repérables à deux cent kilomètres ! En effet, Hell fourmille de plans plus ou moins longs – quand ce ne sont pas des séquences entières – piqués ça et là à des documents d’archives portant sur des animaux exotiques ou des tribus originaires d’on ne sait où. Entre deux plans de dialogues, hop, un petit plan d’un singe qui grimpe à un arbre… Après une scène de lutte contre les zombies, hop, une petite scène d’un coyote qui chope et dévore une espèce de ragondin… Navrant. Il y a tellement d’exemples de ce type que le film en devient vite insupportable, surtout que cela n’apporte strictement rien à l’histoire et ne sert au final qu’à rallonger la durée du métrage. Mais quand le maître du détournement essaie de nous faire passer des vessies pour des lanternes, le résultat en devient carrément hilarant… Preuve en est cette magnifique séquence où la conne de journaliste Lia Rousseau, après s’être tout à coup foutue à poil et peinturluré les seins pour approcher l’une des soi-disant tribus Papou – le quota de nudité de tout bon nanar étant ainsi respecté –, observe un rite funéraire censé se dérouler devant ses yeux grâce à la magie d’un champ-contrechamp tout à fait dérisoire. Ça crève les yeux que cette scène a été volée, déjà par le fait que l’actrice ne soit jamais dans le même plan que ces authentiques indigènes, mais aussi et surtout par la différence énorme de lumière, de grain de l’image et de cadrage qui existe entre les deux plans. Le pire reste sans nul doute les efforts complètement vains du maquilleur pour faire ressembler ses pauvres figurants aux indigènes des stock-shots… Quand on voit dans un plan volé l’aspect très réaliste (puisque réel) des membres de la tribu en question et dans celui qui suit (tourné) la tronche ridicule des acteurs du film, on ne peut que rire à gorge déployée tant on se dit que ce tordu de Mattei cherche vraiment à nous prendre pour des cons. Il y aurait encore des pages et des pages à écrire sur cet aspect du film, mais il est grand temps d’aborder un autre sujet tout aussi intéressant.

Parlons un peu des zombies, puisque malgré ses trompeuses apparences de documentaire diffusé sur Arte à cinq heures du mat’, Virus Cannibale n’en reste pas moins un film de zombies. Curieusement, leur design reste très aléatoire – et on se demande bien pourquoi – : ceux-ci ont la face tantôt grimée de noir, parfois de vert, quelquefois encore de blanc, quand ils ne sont carrément pas maquillés du tout. Néanmoins, les zombies ont au moins l’avantage de ne pas courir, de ne pas parler, de ne pas tendre d’embuscade etc., même si certains d’entre eux ont l’incroyable faculté de s’installer comme si de rien n’était sur le siège d’une voiture en marche… Mais bon, dans l’ensemble, ils sont plutôt convaincants, leur démarche lente et saccadée ainsi que leurs gestes désarticulés suffisant à les rendre un tant soit peu crédibles, même si tous les figurants ne sont pas égaux en termes de qualité de jeu. Il est malheureusement loin d’en être de même pour les acteurs… La plupart d’entre eux se contente de faire acte de présence en ayant l’air de souhaiter plus que tout au monde être ailleurs, sauf peut-être l’acteur Luis Fonoll (Osbourne dans le film) qui apporte un petit grain de folie à son personnage pourtant voué à être aussi cruellement vide que ses comparses. Sans parler de l’actrice Margit Evelyn Newton, qui interprète Lia Rousseau et qui croit dur comme fer que faire les gros yeux à tout-bout-de-champ suffit largement à exprimer la terreur la plus profonde. Faut dire aussi, les dialogues ne sont pas là pour les aider (« On prend ce putain de radeau et c’est parti mon kiki. »), pareil pour les doublages français, hideusement datés et constamment à côté de la plaque. Heureusement, les scènes gore, sans être particulièrement réussies, demeurent correctes et participent un peu à rattraper ce foutoir en y injectant un semblant d’intérêt épisodique.

Hell Of The Living Dead est donc certes un film nul à chier mais qui comporte ce petit je-ne-sais-quoi de délicieusement kitsch qui le rend involontairement drôle et pas si désagréable que ça à mater. De plus, son absence totale de complexes (je parle bien sûr du plagiat de Dawn et des stock-shots), qui demeure tout de même assez incroyable, lui confère un aspect ludique non négligeable qui vient combler un peu le vide intersidéral de son scénario téléphoné. A voir entre fans de nanars ultimes pour se marrer un bon coup !

Return Of The Living Dead (Dan O’Bannon, 1984)

return_of_the_living_dead_poster_01Réalisateur : Dan O’Bannon
Origine : États-Unis
Année de production : 1984
Durée : 1h31
Distributeur : Orion Pictures Corporation
Interdiction : Interdit aux moins de 12 ans
Interprètes : James Karen, Linnea Quigley, Clu Gulager

Frank et Freddy, deux employés d’une société de fournitures médicales, libèrent sans le vouloir un gaz hautement toxique contenus dans d’étranges barils que l’armée avait déposés par erreur il y a quelques années. Instantanément, un cadavre entreposé dans le bâtiment revient à la vie et attaque les deux hommes pour dévorer leurs cerveaux. Ceux-ci réussissent à le maîtriser de justesse et décident de le faire brûler au crématorium d’à côté, tenu par leur vieil ami Ernie, afin de ne pas ébruiter l’histoire. Malheureusement pour eux, la fumée qui s’échappe du crématorium va alors se répandre aux alentours et ranimer les morts du cimetière voisin. Au même moment, un groupe de punks cherche un endroit pour faire la fête. Ils choisissent de se rendre au cimetière…

La présence au scénario de John A. Russo ainsi que les multiples références explicites au film Night Of The Living Dead de 1968 présentent Return Of The Living Dead comme une suite pseudo-officielle du chef-d’œuvre de George A. Romero.  Dans un genre complètement décalé et bien plus drôle qu’effrayant, Return Of The Living Dead initie sa propre saga des morts-vivants, constituée de cinq films tous plus barrés les uns que les autres et dont les deux premiers contribuèrent à insuffler au film de zombie une dimension comique jusqu’alors inexplorée.

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L’humour fait ainsi partie intégrante du film de Dan O’Bannon, célèbre scénariste d’Alien et de Total Recall, entre autres, qui s’essaie ici pour la première et dernière fois à la réalisation. C’est un fait avéré, Return Of The Living Dead ne se prend pas du tout au sérieux et multiplie les scènes cocasses dans lesquelles les zombies ont le premier rôle. Loin d’être gênés par la rigidité cadavérique, ceux-ci parlent comme vous et moi, gambadent comme des cabris, tendent des embuscades (si, si, je vous assure !) et, surtout, sont friands de cerveaux humains (et vivants, tant qu’à faire). La chair fraîche et les tripes goulues importent peu à ces zombies-là, non, tout ce qu’ils veulent, c’est la matière grise… C’est donc sans grande surprise que nous les entendons tout au long du film beugler d’une seule et même voix mortifère  « Cerveaux ! Ceeeerveauuuux… » avant de planter leurs quenottes pourries dans la boîte crânienne de leurs pauvres victimes. Cette nouvelle caractéristique zombiesque, si elle ne fait pas preuve d’une grande originalité (le scénariste a simplement « déplacé » le concept initial de Romero) s’inscrit néanmoins de manière efficace dans la tradition parodique revendiquée par le film. En effet, quoi de plus absurde que des morts qui cavalent partout en hurlant qu’ils veulent des cerveaux ?!

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Quant aux personnages, eh bien, ils sont à la hauteur de leurs ennemis : gueulards, froussards et à deux mille de tension, ils se débattent énergiquement pour se sortir du marasme qu’ils ont eux-mêmes provoqués. Les acteurs Clu Gulager (Burt) et James Karen (Frank) s’en sortent plus que bien en quinquagénaires morbides complètement dépassés par les évènements mais, pour ce qui est de Thom Mathews (Freddy), il n’est pas très difficile de deviner qu’il ne fera pas carrière dans le cinéma grâce à son talent d’acteur, ni à son charisme exceptionnellement absent, d’ailleurs. Les punks sont tous délicieusement ridicules et stéréotypés (Spider, Trash, Suicide… rien que leurs noms en disent long sur les personnages !), tant dans leurs comportements que dans leurs dégaines extravagantes, et évoluent tous dans un joyeux bordel qui s’écoule au gré des crises d’hystérie et des pièges subtilement tendus par les zombies. Il est à noter que Return Of The Living Dead révèlera au grand public la future scream queen Linnea Quigley (Flic ou Zombie ; Le Cauchemar de Freddy ; Night Of The Demons), petite icône du cinéma bis qui connut ses heures de gloire dans le milieu des années 80. Tous ces personnages se charclent donc sans commune mesure pour sauver leur peau au rythme d’actions délirantes et souvent très fun, quoiqu’un peu longues à démarrer.

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Mais si Return Of The Living Dead peut bel et bien être considéré comme une parodie du film de zombie, il n’en néglige pas moins les aspects glauques et cradingues caractéristiques du genre. Et cela s’opère via les maquillages des zombies, assez moches pour l’époque mais qui collent parfaitement à l’univers déjanté du film. De même, si les effets spéciaux des scènes gore sont plutôt mal réalisés (on n’y croit pas une seconde, mais ce n’est pas vraiment gênant), celles-ci sont néanmoins présentes en petit nombre, enfin, juste ce qu’il faut pour produire un bon petit film de zombie. En revanche, le gros souci de Return Of The Living Dead reste son manque de cohérence dans le design de ses morts-vivants. Par exemple, l’on peut aussi bien voir des squelettes décharnés qui ouvrent les yeux (euh…), que des morts-vivants verdâtres ou blanchâtres (les frais) ou encore recouverts de boue (ben ouais, ils viennent tout juste de sortir de leurs tombes…), qu’une espèce de pantin rouge sanguinolent en haillons et aux orbites saillantes qui se meut comme un pervers équilibriste (le zombie du bâtiment de la société où travaillent Frank, Burt et Freddy, le seul vraiment réussi de tout le film). Vous me direz, c’est normal qu’ils n’aient pas tous la même tronche, les morts ne sont pas tous décédés en même temps ; ok, mais bon, n’empêche que le résultat est assez vilain et qu’au final on se dit qu’on est bien loin de la virtuosité plastique d’un Tom Savini ou d’un Greg Nicotero par la suite. Cette absence de logique esthétique se retrouve également au niveau sonore, et il convient de se demander pourquoi les zombies adoptent des voix bioniques d’extraterrestres quand ils peuvent parler tout à fait normalement…

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Outre ces faits légèrement décevants, le principal point faible du film réside dans ses doublages français carrément nuls à chier (mais vraiment…) qui, en plus de ne même pas coller aux lèvres (insupportable !) sont parfois complètement à côté de la plaque niveaux ton et traduction, ce qui donne des dialogues creux et inutiles au possible. Cet inconvénient est d’autant plus fâcheux qu’il gêne réellement l’adhérence du spectateur à l’histoire, celui-ci est sans cesse « sorti » du film  à cause du manque de crédibilité des doublages qui n’ont pas fini de le faire fulminer. En revanche, la musique rock qui rythme Return Of The Living Dead est absolument géniale et soutient l’atmosphère eighties qui se dégage du film de manière très efficace et véritablement plaisante.

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Comme je l’ai signalé dans l’introduction, Return Of The Living Dead multiplie les références à Night Of The Living Dead ; en déclarant par exemple que ce dernier est basé sur des faits réels, ou en montrant les personnages s’efforcer de suivre les conseils de Romero en détruisant le cerveau du premier zombie auquel ils sont confrontés… Ces quelques détails pourraient être fort réjouissants pour les fans si le scénario n’en profitait pas pour lancer quelques petites piques au Père des morts-vivants… En effet, après le litige qui l’opposa à George A. Romero, John A. Russo décida de prendre le large et de mener sa propre carrière zombiesque. Désireux de revendiquer sa paternité du chef-d’œuvre de 1968 et par la même occasion de se le réapproprier, il écrivit le scénario de Return Of The Living Dead qu’il présenta comme la suite directe du premier film. Bref, tout cela pour dire que la rancœur qui émane de ces basses attaques gâche quelque peu l’effet escompté, et qu’au final les références à Night Of The Living Dead ont un arrière-goût faisandé dont le film aurait largement pu se passer. D’ailleurs, si on va par là, la scène durant laquelle les personnages se barricadent dans le crématorium d’Ernie relève plus du plagiat raté que de la caricature de Night Of The Living Dead : le film s’attarde de la même façon sur les moyens mis en œuvre par Spider et ses comparses pour bloquer les portes, les fenêtres, etc. John A. Russo, ou l’art de cracher dans la soupe qu’on est justement en train de bouffer…

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Return Of The Living Dead est donc un film divertissant, avec de bonnes idées et une mise en scène joyeusement fun, qui parvient malgré ses faiblesses à tirer parti d’un humour décalé qui érige les zombies au digne rang de clowns grotesques uniquement là pour nous faire marrer. Le reste de la saga ne sera malheureusement pas aussi réussi (n’est pas Romero qui veut, n’est-ce pas…) mais le film de Dan O’Bannon a néanmoins le mérite d’avoir offert un traitement différent et original à cette figure monumentale du cinéma d’horreur qu’est le zombie, là où d’autres se contentaient d’user de codes tombés en désuétude. A voir ou à revoir en fin de soirées conviviales où la bière coule à flot !

L’Armée des Morts (Zack Snyder, 2003) [remake]

Titre Original : Dawn Of The Dead
Réalisateur : Zack Snyder
Origine : États-Unis
Année de production : 2003
Durée : 1h45
Distributeur : Metropolitan FilmExport
Interdiction : Interdit aux moins de 16 ans
Interprètes : Sarah Polley, Ving Rhames, Jake Weber, Mekhi Phifer

Ana se réveille un beau matin et se retrouve en plein cauchemar : les morts sont mystérieusement sortis de leur sommeil éternel et attaquent les vivants. Après avoir miraculeusement échappé au carnage qui sévissait dans son quartier, Ana rencontre d’autres rescapés : André et sa femme Luda qui est enceinte, Kenneth, un officier de police, et Michael, vendeur de télés de son état. Ils décident de s’unir et de rejoindre le centre commercial le plus proche pour s’y réfugier quelques temps. Ils vont alors devoir faire face à une horde de zombies assoiffés de sang et de plus en plus nombreux tout en s’efforçant de cohabiter…

En 2003, le célèbre publicitaire américain Zack Snyder (300 ; Watchmen ; Le Royaume de Ga’Hoole) s’essaye au cinéma pour la toute première fois et livre un remake des plus réussis du chef-d’œuvre Dawn Of The Dead (Zombie) réalisé en 1978 par George A. Romero. Avec ce film, Snyder contribue à relancer la popularité jusqu’à présent en berne du créateur du zombie mangeur de chair, qui d’ailleurs en profitera pour sortir un an plus tard le quatrième volet de sa saga des morts-vivants, Land Of The Dead. Tout en conservant la trame principale de l’œuvre originale dont il s’inspire, ce remake réussit à se réapproprier le script original de Dawn Of The Dead de manière très personnelle, pour produire un film qui au final n’a plus grand-chose à voir avec son prédécesseur. En plus du fait d’avoir totalement rejeté le folklore zombiesque établi plus de trente ans auparavant par Night Of The Living Dead, l’on peut également observer que la dimension pamphlétaire qui faisait toute la puissance de frappe de l’œuvre de Romero est ici complètement éclipsée, Snyder préférant l’action pure et dure à la critique sociopolitique. Je précise que cet article traite de la version director’s cut, plus longue mais aussi légèrement plus gore que la version cinéma, et dont le principal atout consiste à avoir fourni davantage de détails sur les personnages et leurs vécus respectifs.

Tout commence avec une séquence d’introduction hallucinante qui frappe très fort, l’accent étant mis sur l’état de panique qui secoue un petit quartier américain soudainement mis à feu et à sang et qu’Ana (Sarah Polley, Mister Nobody ; Splice), qui a vu son mari mourir et ressusciter sous ses yeux, tente de fuir malgré les obstacles qui se dressent sur sa route. Fourmillant de détails d’une indéniable efficacité, cette séquence apocalyptique annonce que le film tout entier s’efforcera de véhiculer une terreur brute et instinctuelle qui, en prenant ses racines dans un quotidien admis comme étant sécurisé et contrôlé par notre inconscient collectif, explosera l’ensemble de nos défenses psychiques pour produire un choc audiovisuel dont même les plus blindés d’entre nous ne pourront réchapper. Suivant cette même idée directrice, le générique du début bénéficie d’un montage particulièrement nerveux qui accumule les scènes d’informations télévisées sur un fond de musique country qui agissent comme une sorte d’ellipse visant à faire comprendre au spectateur que la situation a déjà dégénéré et que, tout comme dans le Dawn Of The Dead original, les autorités américaines demeurent impuissantes pour enrayer ce phénomène de contamination collective qui prend de plus en plus d’ampleur. Le contraste généré par cette curieuse association d’images violentes à une musique cool et décontractée, ainsi que les plans semi-subliminaux de visages de zombies sanguinolents et toutes dents sorties, en plus de produire une atmosphère ironique et légèrement mélancolique, opère un processus de distanciation qui nous maintient confortablement dans notre position spectatorielle. En effet, nous sommes sur le point d’assister à l’élaboration d’une histoire, celle de cinq rescapés qui vont tenter le tout pour le tout pour survivre à cet Enfer…

Anoblis d’une superbe photographie qui privilégie les tons froids (bleu, vert, etc.) pour retranscrire l’ambiance désertique et impersonnelle du centre commercial infesté de zombies accros au shopping, les décors de Dawn Of The Dead s’avèreront être le théâtre de scènes glauques et malsaines somme toute assez dérangeantes et sublimées par un montage très esthétisant. Par exemple, la scène du monstrueux accouchement de Luda dans un magasin pour bébé rempli de peluches et de jouets assure un impact considérable sur nos convictions de ce que sont la famille et l’acte de donner la vie… Le film comporte ainsi de nombreuses scènes purement horrifiques (la vieille femme dégueulasse qui décède de ses blessures puis se relève, plus vorace que jamais ; le père contaminé et voué à attendre la mort ; le tragique épisode du voisin armurier Andy ; etc.) qui maintiennent la cohésion de l’ambiance oppressante et la sensation de menace imminente instaurées dès la séquence d’introduction. Mais Dawn Of The Dead sait aussi faire preuve d’humour pour nous permettre de relâcher un peu la pression, notamment en mettant en scène les personnages principaux qui s’amusent à tirer sur des zombies choisis parmi la foule agglutinée devant les portes du centre commercial en fonction de leur ressemblance toute relative avec des personnalités connues.

Les scènes d’action sont quant à elles très bien réalisées en dépit du fait que le film ait maintenant quelques années ; les effets spéciaux restent tout à fait corrects pour l’époque et sont loin de lésiner sur le gore, sans pour autant atteindre le niveau extrême de l’original… Giclées de cervelles, gorges arrachées, crânes transpercés, yeux perforés, le film ne nous épargne rien et fait fi de la suggestion au profit d’un véritable déballage de scènes trash toutes visuellement très bien rendues. Le maquillage des morts-vivants est lui aussi très convainquant et esthétiquement très réussi ; certains d’entre eux sont vraiment impressionnants (le manchot asiatique du début, ou encore le décharné qui fait face à André derrière l’une des vitres blindées du centre commercial, etc.). On regrettera néanmoins qu’ils soient capables de courir (et la rigor mortis alors ?!), caractéristique légèrement incohérente compte tenu de leur état de cadavres ambulants mais qui ne dessert cependant en rien le récit et l’action du film. Les hurlements de bêtes sauvages qu’émettent les zombies lorsqu’ils attaquent sont eux aussi quelque peu ridicules et illogiques (pourquoi diable les humains changeraient-ils de voix une fois morts ?!), mais bon, tout ceci fait partie des choix stylistiques du réalisateur, tout comme le processus de contamination quasi-instantanée par morsure, d’ailleurs (les morts-vivants de Romero ne le devenaient qu’une fois décédés de leurs blessures, ici ce phénomène s’opère dès lors qu’ils sont mordus). En revanche, les yeux blancs et la gestuelle saccadée des morts-vivants de Snyder constituent une très bonne initiative au mythe zombiesque, surtout lorsqu’il nous en est donné à voir des « ratés », dont le cerveau ne se serait pas complètement réactivé, et qui se contentent d’être secoués de spasmes incontrôlables (dans la VO, ils sont d’ailleurs appelés des « spasmo »).

Côté narration, le rythme reste très soutenu, en grosse partie grâce à la vigueur extrême du montage ; de ce fait, le film ne souffre d’aucune longueur et bénéficie d’une excellente mise en scène renforcée par une interprétation crédible de la part des acteurs. On notera également les caméos fort réjouissants de Tom Savini, qui n’est désormais plus à présenter, dans le rôle d’un flic à lunettes noires et grosses moustaches qui déclare le plus sérieusement du monde qu’« il faut leur tirer dans la tête… » ; et de Ken Foree en télévangéliste qui donne son opinion légèrement intégriste sur l’apparition des morts-vivants et qui en profite d’ailleurs pour ressortir sa phrase-culte du Dawn Of The Dead original: « Quand il n’y a plus de place en Enfer, les morts reviennent sur la Terre… ». Cette petite attention de Snyder pour faire plaisir aux fans a de fait pour conséquence de nous rendre un peu plus tolérants vis-à-vis de lui pour ses zombies coureurs de fond…

Dawn Of The Dead est donc un excellent film de zombie qui, en plus de remettre sur le devant de la scène le chef-d’œuvre de 1978, nous offre une relecture personnelle et divertissante du mythe légendaire instauré par Romero avec sa saga des morts-vivants. Grâce à l’originalité de son scénario et à l’efficacité de sa mise en scène produite dans les règles de l’art du cinéma horrifique, Dawn Of The Dead s’érige comme l’un des meilleurs films de zombie des années 2000.

FleshEater – Revenge Of The Living Dead (S. William Hinzman, 1988)

Réalisateur : S. William Hinzman
Origine : États-Unis
Année de production : 1988
Durée : 1h28
Distributeur : NC
Interdiction : NC
Interprètes : S. William Hinzman, John Mowod, Leslie Ann Wick

Un groupe de jeunes part faire du camping dans les bois, le soir d’Halloween. Malheureusement pour eux, le FleshEater vient tout juste d’être sorti de son sommeil éternel et va les prendre en chasse pour les exterminer jusqu’au dernier…

Et en avant pour la critique de l’un des pires films de zombies de tous les temps ! Attention les yeux, c’est du lourd ! Non content d’être le premier zombie mangeur de chair porté à l’écran en 1968 dans Night Of The Living Dead, S. William Hinzman décide vingt ans plus tard de créer son propre film de morts-vivants (ben ouais, y a pas de raison !), qui n’est en réalité ni plus ni moins qu’un honteux plagiat de l’œuvre de George A. Romero. Désireux de s’ériger en tant que digne suite de Night Of The Living Dead, FleshEater n’aura de cesse de vouloir s’incruster au sein de la saga de ce pauvre George en multipliant les faux liens avec le premier volet (déjà par l’intermédiaire de son sous-titre : Revenge Of The Living Dead). Ces efforts pathétiques le conduisent donc à produire une daube infâme et désespérément creuse qui se présente comme une sorte de préquelle foireuse ou de pseudo-suite (on ne sait pas trop) faisant office de véritable torture mentale pour tout spectateur équilibré (non masochiste, j’entends).

Le néant qui se dégage de cette monumentale atrocité cinématographique est donc une authentique souffrance psychologique qui provient autant du fait que l’on ait l’impression d’assister à un mauvais film amateur tourné avec les moyens du bord (genre Camp Blood mais en moins drôle) que de la désagréable sensation d’être pris pour des cons du début à la fin du film. En effet, comme il ne se passe absolument RIEN au niveau de l’histoire, ce bon vieux Hinzman n’a rien trouvé de mieux que d’introduire de nouveaux personnages indéfiniment pour ensuite les faire mourir deux minutes après, et ce dans le but d’espérer combler un peu le vide incommensurable d’un scénario merdique qui peut tenir à l’aise sur une seule page. Au programme : des dialogues transcendants (« J’aime bien ton costume… ») ; de l’action à revendre (« Tu vas me chercher du bois ? ») ; des scènes gore à la limite de l’insoutenable (les gros plans répugnants sur deux personnages étonnamment moches qui s’embrassent comme des machines à laver) ; des zombies ultra-forts à la gueule recouverte de steacks hachés qui toquent aux portes et tendent des embuscades dans le noir ; du sexe hot (pourquoi elle se fout à poil, là ?) ; bref, tout ce qui fait la recette parfaite d’une bonne petite série Z bien à chier.

Mise à part la profusion hallucinante d’incohérences scénaristiques, un truc trop drôle est de voir brusquement les personnages se barricader, sous pression extrême, glissant vers une folie certaine, alors même qu’il n’y a absolument AUCUNE menace à l’extérieur… Trop fort ce Hinzman. Mais à la surprise amusée du début se succède bien vite une exaspération incontrôlable que la musique du film va venir exacerber de par son omniprésence ininterrompue tout au long du film. S’il est possible que vous trouviez la bande-son plutôt plaisante au début du générique, soyez sûrs et certains qu’au bout de vingt minutes elle vous fera pisser du sang par les oreilles. De raccourcis scénaristiques aberrants en scènes de nu incompréhensibles, FleshEater nous balance fièrement sa théorie personnelle de l’apparition des morts-vivants mis en exergue dans Night Of The Living Dead. Oui, parce que, vous comprenez, la « vérité vraie », ce que Romero n’a jamais dit et que Hinzman, lui, connait sur le bout des doigts, c’est que le premier zombie au monde a en réalité été sorti de sa tombe satanique creusée dix centimètres sous terre et recouverte d’un fin tapis automnal de feuilles mortes, et que c’est pour ça qu’il est venu se venger en mangeant tout le monde. Cette séquence magique s’accompagne d’un regard-caméra de Hinzman (qui tient donc le rôle de ce zombie en costard commun aux deux films) qui semble vouloir dire : « Ah Ah ! Vous vous souvenez bien sûr du zombie qui surgit du cimetière et attaque Barbara et Johnny dans Night Of The Living Dead ? Ben c’était moi ! ». Oui, oui, on t’avait reconnu, Hinzman, et ce sera malheureusement difficile d’oublier le visage du créateur d’une bouse pareille…

Techniquement parlant, FleshEater fait peine à voir, surtout ses transitions ignobles effectuées toutes les cinq minutes à grands coups de fondus au noir insupportables et dont chaque scène qui suit n’apporte strictement rien de plus que la première. Sans parler des poursuites à deux à l’heure et des subterfuges risibles pour pallier à un flagrant manque de moyens (chaque zombie venant de mordre se retrouve ainsi avec un morceau de chair entre les dents, pour bien nous faire comprendre que c’est un zombie, et que donc, par conséquent, il mange les vivants), ou encore du choix très pertinent de donner à voir des meurtres d’enfants faussement dramatiques mais réellement pathétiques pour démontrer qu’il s’agit bel et bien d’un film d’horreur, au cas où cela ne nous serait pas encore apparu très clairement… C’est clair, ce film est une horreur, une erreur même, et qui n’aurait certainement jamais dû voir le jour. Les acteurs atteignent des sommets d’inexpressivité (« Oh là là, ma fille est morte… ») tandis que les zombies adoptent une curieuse démarche de sumo (véridique !), le tout agrémenté de quelques rares scènes d’action hyper-mal faites et d’une mollesse qui a quelque chose d’hypnotique (je veux dire par là qu’elles nous plongeraient presque dans un état second… de catatonie).

Mais parlons à présent un peu de ce plagiat… S’agit-il réellement de transposition identique de scènes devenues cultes pour compenser un terrible manque d’imagination ? Mesdames et messieurs, la réponse est OUI, c’est exactement ça ! Et le pire, c’est qu’il n’y en a pas qu’une, de scène volée, mais un bon paquet… En plus de celle que j’ai déjà abordée un peu plus haut, où les personnages, en proie à la plus débile et injustifiée des paniques de l’histoire du cinéma, se barricadent dans une grange pourrie pour se protéger contre le vide ; nous pouvons également citer la scène de fin, dans laquelle des rednecks impitoyables organisent une grande battue aux morts-vivants pour flinguer du gibier humain tout en s’amusant. Même interview d’un flic qui explique la situation à des journalistes, même idée directrice développée au travers des ces chasseurs sadiques, la fin de FleshEater, en plus de durer trois plombes, exhibe son forfait sans vergogne. Et, le fin du fin, le must du film, c’est la mort de ses deux personnages « principaux » (s’il y en a). Là, je crois qu’on peut dire qu’on touche vraiment le fond… Pressentie à des kilomètres par une effusion surchargée de pathos à vous faire vomir, la mort du couple de jeunes est absolument identique à la mort de Ben dans Night Of The Living Dead. C’est cool, parce qu’on le voyait pas du tout venir, en plus… Comme par hasard, les personnages décident justement de sortir de leur cachette quand les chasseurs font le ménage et, comme par hasard encore, ils se font tuer d’une balle en pleine tête parce qu’ils ont été confondus avec des zombies ; oh là là, que de coïncidences, c’est fou la vie, quand même… Bref. Voilà, quoi. Tout ça pour dire que ce film n’est qu’une merde prétentieuse.

FleshEater fait donc partie des PIRES films voulant s’approprier un peu de l’aura de Night Of The Living Dead, mais aussi et plus généralement de la production cinématographique toute entière en matière de zombie. Orgueilleux, ennuyeux, consternant et chapardeur, ce film est à placer au fin fond des oubliettes des films les plus inutiles du siècle passé. A éviter par tous les moyens !

Dawn Of The Dead (George A. Romero, 1978)

Réalisateur : George A. Romero
Origine : États-Unis, Italie
Année de production : 1978
Durée : 1h55
Distributeur : Anchor Bay Entertainment
Interdiction : Interdit aux moins de 16 ans
Interprètes : Ken Foree, Scott H. Reiniger, David Emge, Gaylen Ross

Dans le monde entier, les morts sont revenus à la vie et se repaissent des vivants. L’Amérique est à feu et à sang, les autorités s’efforcent d’endiguer l’épidémie et de vives polémiques déchirent la population. Un groupe de survivants décide de s’enfuir et de se réfugier dans un centre commercial. Alors que la vie s’organise à l’intérieur, la situation empire à l’extérieur…

Réalisé dix ans après Night Of The Living Dead, Dawn Of The Dead (titre original de notre Zombie européen) signe le retour en force de George A. Romero, désormais détenteur d’un certain prestige et bien décidé à aller jusqu’au bout de son propos. La version dont je vous parlerai dans cet article est celle de Dario Argento, qui s’est vu confier la postproduction du film pour une version européenne.  Le grand maître du giallo a ainsi assuré le montage, plus court mais aussi et surtout beaucoup plus percutant et rythmé que celui de Romero, ainsi que la composition de la musique du film, interprétée par le fameux groupe italien Goblin (Suspiria ; Les Frissons De l’Angoisse).

D’emblée, le film frappe très fort avec sa séquence d’introduction complètement déchaînée rendant compte de la situation apocalyptique à laquelle la population américaine tente vainement de faire face. La frénésie du montage cut, l’anarchie des échanges verbaux entre les différents protagonistes ainsi que la cacophonie sonore produisent un effet de pure panique qui scotche d’emblée le spectateur à son siège. Le réalisateur en profite par ailleurs pour poursuivre la mise en image du dilemme éthique déjà présent dans Night Of The Living Deadet qu’il filera tout au long de sa saga : comment considérer les morts-vivants ? Faut-il les tuer froidement d’une balle dans la tête, même s’il s’agit de nos amis ou de notre famille ? Cette séquence survoltée présente ainsi deux camps opposés (l’un pour « tuer » les morts et l’autre qui s’y refuse) qui s’acharnent tous deux à défendre leur position respective avec verve alors que la majorité rejette de toute évidence l’idée d’un traitement impitoyable de leurs pairs revenus d’entre les morts. En quelques minutes seulement, Romero nous fait part de ses considérations bien pessimistes sur notre condition et nous invite à les partager en nous moquant de cette faiblesse sentimentale intrinsèquement humaine. Cette séquence éprouvante a pour but de plonger le spectateur dans une ambiance dramatique qui n’aura de cesse de monter crescendo tout au long du film et qui laisse décidément bien peu d’espoir quant à la survivance de cette espèce définitivement esclave de son inclinaison aux sentiments les plus futiles, même en temps de crise comme celui-ci.

Par la suite, le film se dévoile extrêmement gore, ce qui lui valut d’être considéré par certains comme « le film le plus effrayant de tous les temps ». Les effets spéciaux et maquillages sont réalisés par le génial Tom Savini, qui tient d’ailleurs le rôle d’un biker casse-cou armé d’une machette dans le film (personnage que l’on retrouvera par la suite dans Land Of The Dead). Ce dernier qui n’avait malheureusement pas pu collaborer au tournage de Night Of The Living Dead, car il était à cette époque mobilisé pour la guerre du Vietnam en tant que reporter d’images, se rattrape ici en réalisant de véritables prouesses esthétiques. Le spécialiste avoue par ailleurs s’être directement inspiré des horreurs qu’il a côtoyées durant la guerre, ce qui donne un rendu d’un réalisme impressionnant pour l’époque. Ainsi, certaines scènes du centre commercial (l’éviscération de l’un des bikers en tête) sont absolument sublimes et sidérantes de vraisemblance, tandis que d’autres, comme le « repas » des morts-vivants qui se nourrissent des membres et d’organes humains, sont répugnantes à souhait. Les gros plans qui s’attardent longuement sur les yeux affamés ou la bouche ensanglantée des zombies, de même que les inserts sur les morceaux de chair fraîche et les os rongés, constituent quant à eux un véritable choc visuel qui s’imprime de force dans la rétine et restera à jamais gravé dans les mémoires. Par ailleurs, l’un des moments cultes du film est celui où les bikers s’éclatent à jeter des tartes à la crème à la face hagarde des zombies. Absolument jouissive, cette séquence bénéficie d’une bonne dose d’humour qui confère un peu de fraîcheur à cet univers glauque où le sang et les tripes coulent à flot. Ces scènes d’anthologie signent la gloire de Romero, qui a réussi grâce à son audace et à son génie à bouleverser du tout au tout notre perception du cinéma d’horreur.

Pour ce qui est de l’aspect général des zombies, il est en fait plutôt inégal, et l’on peut dire que seuls les personnages principaux (Roger et Stephen une fois transformés) sont vraiment réussis car très détaillés. Quant aux autres, même s’ils demeurent bien évidemment plus que corrects et parfaitement crédibles, ils connaissent encore quelques petits cafouillages niveau maquillage ; il faudra donc attendre son prochain film, Day Of The Dead, pour enfin voir des zombies arrivés au summum de la perfection. Néanmoins, l’oncle George reste toujours aussi fort dans l’art de diriger ses figurants ; l’on retrouve ainsi la gestuelle caractéristique de l’œuvre Romérienne et il faut bien avouer que c’est un véritable plaisir que de voir les zombies déambuler sans but dans le centre commercial, chuter dans les escalators ou barboter dans les fontaines. De plus, Romero, regrettant probablement d’en avoir trop dit quant aux origines de l’apparition du phénomène dans Night Of The Living Dead (même si c’était déjà plutôt vague), décide de brouiller les pistes en lâchant une théorie issue du vaudou comme éventuelle explication (« Quand il n’y a plus de place en Enfer, les morts reviennent sur la Terre… »). Du coup, même dix ans après, le mystère reste total et, tout au long de la saga, le public n’aura jamais connaissance des véritables raisons qui auront poussé les morts à se relever.

Le jeu des acteurs est lui aussi sans faille, et l’on a tôt fait de s’attacher à ce petit groupe de survivants qui tente le tout pour le tout pour s’échapper de cet enfer sur terre. Les conséquences de l’isolement de longue durée qu’ils subissent sont très bien rendues, le film parvenant à représenter la lente déchéance mentale de chacun des protagonistes de manière très efficace (Roger qui pète les plombs et devient de plus en plus imprudent ; la journaliste qui joue les pin-up en se maquillant comme Bozo le clown, etc.). L’organisation que met en place le groupe pour survivre reste elle aussi très plausible de par sa simplicité ainsi que la spontanéité des différentes réactions et décisions des personnages.

En effet, les héros de Zombie sont avant tout humains, c’est donc sans grande surprise que nous les observons s’efforcer de vaincre leur angoisse par le biais de la consommation. Une fois le centre commercial accessible après l’extermination des zombies environnants, la joie explose : une jouissance semblable à celle d’un enfant en extase devant le rayon des jouets et qui présage leur lente mais sûre ascension vers une folie certaine. Les personnages se saisissent alors de tout ce qui leur tombe sous la main (montres, bijoux, manteaux, chapeaux, etc. ; des futilités en somme) tout en essayant de se convaincre qu’il existe bel et bien quelque avantage au tragique de leur situation inextricable. En choisissant la consommation d’objets pure et simple comme dernier sursaut de joie de l’humanité avant son extinction, Romero affirme le côté pamphlétaire de son œuvre (qu’ont dédaigné les critiques de l’époque) et livre une satire féroce de la superficialité des préoccupations principales de la population américaine (et même mondiale). « Ils viennent ici par habitude. Ce lieu devait tenir une grande place dans leur vie… » Cette phrase culte appuie la mise en évidence de cet engrenage pathétique mis en place par une société consumériste et égoïste que Romero rejette de toutes ses forces. A cet instant, c’est bel et bien la voix du réalisateur qui résonne à travers les paroles de Peter, interprété par Ken Foree (Massacre A La Tronçonneuse 3 ; L’Armée Des Morts), acteur de séries Z qui signera son retour zombiesque trente ans plus tard avec Zone Of The Dead, film serbe raté qui relève davantage d’une volonté de « recyclage » que d’innovation.

Avec Zombie, George A. Romero parvient à produire un véritable film d’auteur devenu par la suite  au moins aussi culte que Night Of The Living Dead, beaucoup plus violent et dérangeant que son prédécesseur. Une œuvre digne de figurer au panthéon des films d’horreur les plus marquants de l’histoire du cinéma de genre, et qui témoigne de par ses moyens extrêmes de l’immense force de frappe du maître incontesté des morts-vivants.

Night Of The Living Bread (Kevin S. O’Brien, 1990)

Réalisateur : Kevin S. O’Brien
Origine : États-Unis
Année de production : 1990
Durée : 08 minutes
Distributeur : Elite Entertainment
Interdiction : Aucune
Interprètes : Vince Ware, Katie Harris, Robert J. Saunders

Arrivés au cimetière pour fleurir la tombe de leur mère, Barbara et Johnny sont attaqués par des pains de mie vivants. Johnny étant mis KO, Barbara court se réfugier dans une maison de campagne où elle rencontre Ben et deux autres survivants. Mais ils ne vont pas tarder à être encerclés par une horde de pains de mie impitoyables qui cherchera par tous les moyens à avoir leur peau. L’invasion ne fait que commencer…

Petite parodie assaisonnée d’un humour délicieusement kitsch de Night Of The Living Dead de George A. Romero, ce court-métrage indépendant de Kevin S. O’Brien obtint un succès inespéré lors de sa sortie. Tout d’abord diffusé sur une chaîne de télévision locale de Pittsburgh, (Pennsylvanie) puis carrément inclus dans les bonus de l’édition dvd célébrant le trentième anniversaire du chef-d’œuvre de l’initiateur de la célèbre saga des morts-vivants, Night Of The Living Bread est une petite perle comique dont l’aspect volontairement désuet ravira les fans du film original.

Intégralement en noir et blanc, le film multiplie les effets « vieillots » pour se rapprocher au maximum de son modèle. L’image n’est pas très nette et la musique reste très présente, tonnant son thème dramatique de manière exagérée et vraiment très drôle compte tenu du décalage existant entre le son et les images qui nous sont données à voir. En effet, la situation est tout ce qu’il y a de plus grotesque : des pains de mie sautent littéralement au visage de leurs victimes qui se débattent de toutes leurs forces mais qui finissent immanquablement par périr des violentes attaques de leurs assaillants enragés.

Il est absolument hilarant de s’imaginer (sans mal) les mecs hors cadre qui balancent les pains de mie sur les acteurs, ou encore les fils qui les suspendent dans les airs. Les scènes où les personnages brandissent toaster et micro-ondes pour tenter de repousser les pains de mie atteignent des sommets en matière d’humour absurde ; de même que les conseils prodigués par les autorités par l’intermédiaire de la télévision, suggérant à la population de se méfier des restes au frigo qui peuvent également devenir agressifs si l’envie leur en prend ! Le final où Ben, ne voyant plus d’ennemis par la fenêtre, se décide à ouvrir la porte et se retrouve enseveli en forme de croix sous une montagne de pains de mie tueurs clôt avec brio cet hommage cocasse au film qui a révolutionné le cinéma d’horreur vingt ans auparavant.

Une bonne petite parodie en somme, très simple mais très fun, qui tire toute son efficacité d’une ambiance bon enfant et d’une utilisation ingénieuse des moyens du bord. Dans le même genre, je vous conseillerais la fausse bande-annonce Revenge Of The Gang Bang Zombies, moins innocent mais tout aussi drôle !

Night Of The Living Dead (George A. Romero, 1968)

Réalisateur : George A. Romero
Origine : États-Unis
Année de production : 1968
Durée : 1h36
Distributeur : Films Sans Frontières
Interdiction : Interdit aux moins de 16 ans
Interprètes : Duane Jones, Judith O’Dea, Karl Hardman

Comme toutes les années, Barbara et son frère Johnny parcourent un long trajet en voiture pour venir fleurir la tombe de leur père. Alors que Johnny s’amuse à effrayer sa sœur, un homme étrange surgit du cimetière et attaque Barbara. Johnny court au secours de sa sœur mais, dans la bagarre, il tombe et se fracasse le crâne contre une pierre tombale. Désormais seule et affolée, Barbara court se réfugier dans une maison de campagne isolée où elle rencontre d’autres survivants. Ils essaient tant bien que mal de se barricader, mais les assaillants sont de plus en plus nombreux et semblent vouloir à tout prix pénétrer dans la maison. La radio leur annonce alors une terrible nouvelle : les morts se relèvent pour attaquer les vivants…

Night Of The Living Dead restera à jamais gravé dans les mémoires pour avoir plongé la population soixante-huitarde dans l’horreur la plus primaire et dévasté par la même les idéaux « flower power » de l’époque avec une virulence exacerbée que George A. Romero n’aura de cesse d’envoyer à la face de la société américaine dans l’ensemble de sa saga des morts-vivants. Tombé dans le domaine public pour avoir négligé ses droits d’auteur, ce chef-d’œuvre inégalable entraîna un engouement sans pareil chez les cinéastes et donna naissance sans le vouloir à bon nombre de films plus ou moins réussis s’autoproclamant suites de l’œuvre de Romero. Revenons donc sur cette pièce maîtresse du cinéma de genre qui contribua à lancer la nouvelle vague du cinéma américain des années 70 et qui, en dépit d’un budget extrêmement réduit, réussit le pari fou de produire ce qui allait par la suite être considéré de manière unanime comme l’un des plus grands films du siècle passé.

Mises à part quelques cafouillages techniques liés au montage et le choix du noir et blanc (plus dicté par des impératifs budgétaires que par une quelconque volonté esthétique), Night Of The Living Dead reste une œuvre véritablement  intemporelle tant les sujets qu’elle met en avant sont encore d’actualité. Les zombies ne sont au final qu’une sorte de prétexte pour dénoncer les aberrations du comportement humain, concept que Romero utilisera dans tous ses films sur les morts-vivants. En effet, plus que de l’envahissement imminent d’une nouvelle espèce déviante, ni vraiment morte, ni vraiment en vie, le film nous parle davantage d’un confinement, aussi bien spatial que moral, dans lequel tente bon gré mal gré de cohabiter un petit groupe de personnes. Chacun étant enfermé dans ses propres convictions, trouver un terrain d’entente s’avère être quasiment une mission impossible, ce qui causera la perte de chacun des protagonistes du film. Alors que tout autour de lui, la mode consiste à prôner la paix et l’amour, George A. Romero, lui, s’évertue à prouver que nos différences, si elles ne peuvent être dépassées en moment de crise, auront irrémédiablement raison de nous.

Outre tenir un discours à contre-courant de son époque par des moyens plus que frontaux, le créateur du « zombie mangeur de chair » s’affaire à mettre en place tous les codes que l’on retrouvera par la suite dans sa saga des morts-vivants. La lenteur cadavérique du zombie, son besoin irrépressible de dévorer de la viande humaine, la contamination quasi-instantanée par morsure, la destruction du cerveau comme seul moyen d’en venir à bout, etc. ; toutes ces caractéristiques propres au zombie Romérien sont établies avec une cohérence stylistique pour le moins surprenante chez un jeune réalisateur qui dirige ici son tout premier film, dont il est également le scénariste (avec  John A. Russo) mais aussi le monteur, directeur de la photographie et même figurant. D’ailleurs, l’excellente direction de ses acteurs principaux a également contribué au succès de Night Of The Living Dead, même si la séparation des deux camps que forment les personnages a quelque chose de manichéen (Ben incarne le Bien, les vraies valeurs et le bon sens, tandis que Harry incarne le Mal, la sournoiserie et la lâcheté). Mais, fort heureusement, les autres personnages secondaires (Tom et Judy Rose, Helen et sa fille Karen) sont assez présents et suffisamment élaborés pour efficacement rééquilibrer la balance et donner à la situation une puissance de frappe ahurissante qui convainc autant par l’aspect très réaliste dont bénéficie le scénario que par la superbe interprétation des acteurs. Dans ce petit groupe hétérogène, Barbara (Judith O’Dea) fait office de figure à part, tant du point de vue de son comportement que du traitement scénaristique de son personnage. De personnage principal, elle glisse progressivement vers le statut de personnage secondaire tandis que Ben fait exactement le cheminement contraire et, du coup, les rôles s’inversent avec subtilité sans que le spectateur ne s’en rende vraiment compte. L’inertie de Barbara et l’instinct de survie de Ben contribuent à les faire s’échanger leur rôle comme par un accord implicite passé sous la pression de la loi du plus fort qui par ailleurs imprègne tout le film. Ce sont donc les interactions conflictuelles entre les personnages et l’inextricabilité de la situation principale qui ont en grande partie produit l’impact social du film, mais pas seulement…

Car les zombies constituent eux aussi un véritable choc visuel qui vient forcer la garde du spectateur moyen précisément là où il ne s’y attend pas… Presque avec un sadisme consommé, George Romero met en scène des êtres comme vous et moi, des enfants, des vieillards, des jeunes filles en fleurs et des adultes respectables, à la différence près qu’ils avancent en beuglant et se livrent à des orgies cannibales. Non seulement ce bon vieux George a eu l’audace de choisir un acteur Noir (Duane Jones) pour interpréter le personnage principal de son histoire (ce qui n’était pas une mince affaire à l’époque), mais en plus il s’est permis de donner à voir des femmes nues et des hommes en pyjama qui dévorent leur prochain, et même des petites filles qui assassinent leurs parents à la truelle ! Il est difficile de ne pas tomber en admiration face à une telle prise de position jusqu’au-boutiste qui ne recule devant rien pour faire passer son message. En tout cas, ça a le mérite d’être clair : Romero déclare la guerre au système américain en pulvérisant ses pseudo-valeurs éthiques les unes après les autres par le biais d’images coups de poing qui viennent buter contre la morale bien-pensante de l’époque.

Les scènes gore sont quant à elles d’une violence abrupte, sèche, vectrice d’un effroi pur  et annonciatrice d’un genre spécifique dans lequel Romero va exceller tout au long de sa carrière. Les inoubliables scènes de « repas », durant lesquelles les zombies se repaissent gloutonnement de viscères gluantes, de foie ou de membres fraîchement arrachés des corps calcinés quelques minutes plus tôt, offrent un véritable aperçu de ce qu’allait être le cinéma de genre quelques années plus tard : un art en pleine révolte,  devenu presque marginal et désireux de transgresser tous les interdits et de représenter l’irreprésentable. Les scènes de « repas » des morts-vivants ou d’éviscérations constitueront par la suite la sanglante « signature » du maître dans ses autres films de la saga Of The Dead. Mais il est également à noter que dans certains cas, le film fait appel à la suggestion (pour des défoncements de crânes et autres joyeusetés), concept d’autant plus efficace qu’il permet au spectateur de s’en donner à cœur joie pour imaginer ce que les bruitages sous-entendent…

Chef-d’œuvre avant-gardiste du cinéma d’horreur, pamphlet sociétal sans précédent d’une Amérique en chute libre, initiateur de la figure fantastique du zombie, Night Of The Living Dead ne compte plus les domaines qu’il a révolutionnés en cette année de 1968…  Le premier film du cinéaste de Pittsburgh reste  incontestablement le témoin indétrônable des bouleversements éthiques et esthétiques de son temps, de même qu’une œuvre d’auteur indéniablement réussie qui procurera à tout amateur de films de genre une exquise décharge d’adrénaline horrifique.

Remarque à part, il me semble important de signaler que faute de droits d’exploitation, une kyrielle de (mauvaises) versions du film viennent sans aucun scrupule envahir le marché. Les bacs à dvd sont ainsi remplis de versions hideusement colorisées et remasterisées, comportant le plus souvent des scènes supplémentaires ou des scènes coupées retournées de manière différente (avec des marionnettes, par exemple…), des séquences d’animation, ou encore une bande-sonore différente… Et j’en passe. Prenons le cas de John A. Russo (coproducteur et coscénariste de Night Of The Living Dead), très représentatif de l’envergure que peuvent prendre ces abus honteux : après avoir tourné le dos à George A. Romero à la suite de nombreux différends, John A. Russo décide de revendiquer sa paternité du premier volet de la saga des morts-vivants en sortant pour le trentième anniversaire du film un director’s cut (le Survivor’s Cut)soi-disant remasterisé et comportant des pseudo-scènes inédites (tournées sans l’accord de son ancien meilleur ami) qui ne comportent strictement aucun intérêt si ce n’est définitivement entacher l’œuvre originale du Maître des zombies. Triste affaire que celle-ci, qui n’est pourtant qu’un exemple parmi tant d’autres…

Erotic Nights Of The Living Dead (Joe d’Amato, 1980)

Titre original : Le notti erotiche dei morti viventi
Réalisateur : Joe d’Amato
Origine : Italie
Année de production : 1980
Durée : 1h44
Distributeur : /
Interdiction : Interdit aux moins de 18 ans
Interprètes : Laura Gemser, George Eastman, Dirce Funari, Mark Shannon

Un promoteur immobilier se rend en bateau avec sa petite amie sur une île isolée où il compte développer un complexe immobilier. Sur place, ils sont mis en garde par une jeune femme et un vieil homme des dangers du lieu.

Allez, encore une énième variante du cultissime Night Of The Living Dead de George A. Romero… En tout cas, celle-là ne semble pas craindre le ridicule ! Ce « film », également connu sous les titres sans équivoque de La Nuit Fantastique Des Morts-Vivants (en français) ou encore Sexy Nights Of The Living Dead,  est le forfait avéré d’un certain réalisateur italien profondément rattaché au cinéma d’exploitation : le (bien) nommé Joe d’Amato, à qui l’on doit une pléiade de films porno et/ou d’horreur  assez gratinés niveau titres, tels que Le Déchaînement Pervers de Manuela, Antropophagus et Homo Erectus, et qui par ailleurs semble vouer un culte sans bornes au personnage érotique d’Emmanuelle (Emmanuelle Autour Du Monde ; Emmanuelle Et Les Derniers Cannibales ; Emmanuelle Et Les Filles De Madame Claude ; etc., etc., je vais pas tous vous les faire)…

Tout au long du film, on peine vraiment à comprendre où ce tordu de d’Amato a bien voulu en venir … Ben ouais, pourquoi diable aller foutre des scènes érotiques voire même carrément pornographiques dans un film soi-disant d’horreur ? Car c’est un fait incontestable : autant le public de films X que celui d’horreur ne sauraient trouver un quelconque intérêt à cette daube ultra-kitsch qui se targue de pouvoir mêler les deux genres avec une absence totale de cohérence et surtout de souci artistique. D’autant plus qu’il fait preuve d’une radinerie incroyable autant en termes de scènes de sexe que d’horreur, au moins aussi rares dans le film que les bons acteurs dans ce type de cinéma bis italien des années 70-80. C’est sans doute cela, le pire : il ne se passe strictement rien dans ce putain de film, rien de rien, nada, néant. C’est le vide… A la limite (quitte à le voir…) pouvions-nous tabler sur la rencontre éclectique des zombies avec le sexe… Même pas ! Faut pas pousser, le film se garde bien de se risquer à briser les tabous autour de la nécrophilie, non, il se contente tout juste de nous donner à voir quelques fringants italiens moustachus se taper les unes après les autres des actrices qui n’acceptent pas toujours de se faire filmer de face la bouche pleine…

Car c’est bien ça, le plus ridicule dans cette histoire : l’hésitation perpétuelle du film à se positionner sur le genre érotique ou pornographique. Ne pouvant se décider, il choisit tout bonnement d’alterner entre les deux. Par exemple, alors que la scène d’introduction (minable) met en scène assez chastement (entendez : les sexes ne sont pas montrés) un couple en train de sauvagement faire l’amour dans les sous-sols d’un hôpital psychiatrique tandis qu’un interné jouit (au sens littéral du terme) d’assister à la scène ; la séquence de sexe suivante nous donne carrément à voir de la pornographie pure et dure (bien que désuète), avec pénétration et tutti quanti… Ce sera d’ailleurs la seule et unique de tout le film, les autres faisant plutôt dans le registre « érotisme cheap », par manque de couilles ou manque de figurantes sexuellement libérées, allez savoir ! Quand aux scènes d’horreur, elles doivent être au nombre de trois, à tout casser : une au début (absolument pourrie), une au milieu (déjà un peu mieux mais quand même naze) et une tragiquement longue à la fin, comme si le film voulait à tout prix rattraper le temps perdu en nous mettant la dose de zombies avant le générique. Les zombies se calquent légèrement sur ceux de Lucio Fulci dans L’Enfer Des Zombies (chair décomposée style « papier mâché » ; vers grouillants sur le visage et au creux des orbites ; etc.) mais uniquement le temps d’une séquence, d’Amato préfèrera par la suite leur foutre des foulards sur la gueule, tout simplement. Les scènes « d’action » sont merdiques, elles aussi : quand les zombies n’arrachent pas du tissu froissé en guise de lambeaux de gorge de leurs victimes, ceux-ci sortent de leurs tombes enterrées à 20 centimètres de profondeur avec une lenteur exagérée. Aussi nul en tant que film d’horreur qu’en film de cul, mais que reste t-il donc de cet Erotic Nights ?

Rien. Laura Gemser, peut-être ? Même pas… « Black Emmanuelle » ne sert pas à grand-chose, à vrai dire, pas plus que le reste du casting d’ailleurs. A peine fait-elle une jolie tapisserie. Quant au scénario, eh bien, il n’y en a pas, tout simplement. On ne peut même pas dire qu’il sert de prétexte foireux à une accumulation de scènes de sexe vicelardes, puisque comme je l’ai déjà évoqué précédemment, le film fait montre d’une pingrerie rare en la matière. Non, en fait, le film s’attarde sur des détails aussi inutiles que crispants : les deux personnages principaux qui parlent pour ne rien dire en contemplant la mer sur le pont de leur bateau de riche ; les allers de l’un du bateau à la plage ; les retours de l’autre de la plage au bateau, etc. Bref, aucun intérêt. Le retournement final, aussi ridicule qu’embarrassant, tombe à plat comme un suicide du deux-centième étage, on ne comprend même pas comment ils ont pu trouver une idée aussi minable et en plus la garder au montage final. Sans parler des pseudo-scènes dérangeantes, plus pitoyables encore que les scènes de sexe « normales » : une strip-teaseuse à l’incroyable talent de déboucher les bouteilles de champagne avec son vagin ; ou encore le pauvre type qui voit son pénis servir d’amuse-gueules à la « sexy zombette » du film… Le tout servi par des super-musiques d’ascenseur (ou de supermarché, ça dépend) si caractéristiques des films X et surtout si ringardes… Seule le thème d’introduction est pas mal, car il s’inscrit dans le genre des péloches d’horreur italiennes de l’époque, mais malheureusement on ne l’entendra plus jusqu’à la scène finale, d’Amato optant pour le choix très judicieux de nous seriner avec ses mélodies inaudibles durant 1h44 sans discontinuer.

En définitive, le nom d’Erotic Nights Of The Living Dead n’évoque que du vide dans les cerveaux, le vide de l’absence totale de talent artistique et de la moindre parcelle de cinéphilie, le vide de l’arrivisme méprisable et du manque de fric, le vide de l’incohérence formelle et narrative. Ce film est presque irregardable pour quiconque détient un minimum de bon goût (que ce soit en films pornos ou en films de zombies) et surtout d’instinct de survie, un nanar même pas drôle ni même édifiant qu’il vaut mieux effacer dès à présent de vos mémoires.

Night Of The Living Dead (Tom Savini, 1990) [remake]

Réalisateur : Tom Savini
Origine : États-Unis
Année de production : 1990
Durée : 1h25
Distributeur : Columbia Tristar Dvd
Interdiction : Interdit aux moins de 16 ans
Interprètes : Tony Todd, Patricia Tallman, Tom Towles

Barbara et son frère Johnny viennent fleurir la tombe de leur mère récemment décédée. Alors que Johnny s’amuse à effrayer sa sœur, un homme étrange surgit du cimetière et attaque Barbara. Johnny court au secours de sa sœur mais, dans la bagarre, il tombe et se brise la nuque contre une pierre tombale. Désormais seule, Barbara court se réfugier dans une maison de campagne isolée où elle rencontre d’autres survivants. Ils essaient tant bien que mal de se barricader, mais les assaillants sont de plus en plus nombreux et semblent vouloir à tout prix pénétrer dans la maison. Ils vont alors comprendre à leurs dépens la terrible vérité : les morts se relèvent pour attaquer les vivants…

Célèbre spécialiste du maquillage et des effets spéciaux au talent reconnu, Tom Savini passe derrière la caméra pour la première et dernière fois avec ce remake du célèbre film Night Of The Living Dead réalisé en 1968 par son vieil ami George A. Romero, avec qui il a par ailleurs longtemps collaboré. Loin de ressembler aux multiples daubes pestilentielles qui ont maintes fois tenté de s’approprier un peu de l’aura du film de l’oncle George, ce remake, produit par le papa des morts-vivants en personne, réussit l’exploit de se hisser à la hauteur de l’œuvre originale, et peut-être même de la dépasser…

Bien que l’histoire de cette nouvelle version de Night Of The Living Dead suive à peu près le même déroulement narratif que l’œuvre de Romero, Tom Savini a néanmoins pris soin de glisser quelques variations scénaristiques et stylistiques qui ne sont pas pour nous déplaire. En effet, les fans du film original adoreront se laisser piéger par les feintes du réalisateur qui prend un malin plaisir à se jouer de nos attentes pour mieux nous surprendre. Subtiles et efficaces, ces quelques nuances permettent à Savini d’innover tout en restant fidèle à l’œuvre culte dont il offre une relecture pour le moins intéressante et originale.  Par exemple, la Barbara version 1990 (interprétée par la superbe Patricia Tallman) n’a absolument plus rien à voir avec la Barbara de 1968, la mollesse caractéristique de cette dernière ayant tout bonnement été remplacée par une niaque virulente qui en surprendra plus d’un. De même, le personnage de Tony Todd (Candyman, Destination Finale), Ben, tient ici le second rôle principal et non plus le premier : même si son comportement et son statut de leader restent identiques à celui du Ben jadis interprété par Duane Jones, c’est tout de même Barbara que le spectateur suit du début à la fin du film. Quant aux personnages secondaires, ils restent à peu près les mêmes, si ce n’est Judie Rose, l’épouse de Tom, qui s’est entre-temps métamorphosée en hystérique criarde qu’il nous tarde de voir périr dans les flammes.

Par ailleurs, le film regorge de clins d’œil qui constituent un véritable régal pour les fans. Citons en exemple la boîte à musique au travers de laquelle le spectateur pouvait apercevoir le visage décomposé de Barbara dans le film original qui se retrouve ici brisée en milles morceaux lors d’un moment d’extrême agitation, ou encore le sang qui gicle sur la truelle lors de la mort d’Alice Cooper, cette même truelle qui avait servi trente ans plus tôt à la jeune Karen Copper (ici rebaptisée Sarah) pour opérer le matricide qui avait bouleversé une génération toute entière de cinéphiles. Ce ne sont là que quelques exemples parmi beaucoup d’autres qui témoignent de la complicité qui existe entre ces deux grands artistes réunis pour le trentième anniversaire de Night Of The Living Dead par la motivation commune de produire un film authentique et de qualité certaine.

Les zombies sont quant à eux très réussis et véritablement effrayants, les maquillages de John Vulich et Everett Burrell ayant produit des merveilles de laideur post-mortem. Appliquant presque à la lettre l’ensemble des codes initiés par le réalisateur fétiche du cinéma zombiesque, Savini nous donne à voir des morts-vivants de tous horizons, extrêmement lents et qui attaquent « en meute » jusqu’à ce que leur faim gargantuesque soit assouvie. Brutal mais pas vraiment gore, ce nouveau Night Of The Living Dead nous prive de « repas » (des zombies, j’entends) mais nous offre en compensation une diversité des corps absolument jouissive pour tout amateur de zombies. Obèses ou squelettiques, clochards ou costards-cravates, sortis du cimetière ou fraîchement décédés puis revenus à la vie, les morts-vivants forment un groupe terrifiant autant par son hétérogénéité qui n’est pas sans manquer de vraisemblance que par les balafres béantes qu’ils exposent sans aucune pudeur. La violence est donc principalement suggérée, même si Savini, généreux, nous balance de temps en temps de franches giclées de sang ou de bons petits transperçages de crânes juste exactement comme on les aime.

La fin du film diffère largement de celle du scénario de 1968, d’une part parce que, contre toute attente, la rousse et non plus blonde Barbara se sort indemne de ce qui pourrait bien être la plus longue nuit de toute se vie ; mais aussi pour le message que le vétéran du Vietnam tente de nous faire passer par l’intermédiaire d’images aussi explicites que cruelles. En effet, le film s’attarde à nous montrer des chasseurs rednecks qui profitent de l’anarchie de la situation pour se décharger de leurs pulsions sadiques en se livrant à des jeux morbides sur les zombies (concours de force, stand de tir et autres attractions de fête foraine) tandis que l’héroïne observe la scène et déclare « Ils sont nous. Nous sommes eux ». Ce concept supposant que les monstres ne sont finalement pas ceux que l’on croit était déjà mis en avant de manière implicite par Romero dans son Night Of the Living Dead et perdurera dans toute sa saga des morts-vivants (notamment à la fin de Diary Of The Dead). Tom Savini clôt ensuite son film de la même manière que l’œuvre originale, par le montage de photos illustrant la fameuse scène finale du bûcher des morts-vivants, traînés et entassés dans leur « fosse commune » comme de la vulgaire bidasse avariée.

Le seul et unique long-métrage du très charismatique « Sex Machine » (voir Une Nuit En Enfer de Robert Rodriguez) peut donc être légitimement considéré comme un véritable remake digne de ce nom et faisant honneur au chef-d’œuvre ultime de ce très cher George ; mais aussi comme un excellent film de zombies comme on en voit que trop rarement, original et captivant, et qui livre ici un hommage majestueux aux films de genre.